C’était un départ inattendu pour l’équipe nationale masculine du Canada au Championnat mondial 2021 de l’IIHF – et pas dans le bon sens du terme. Après des défaites contre la Lettonie, les États-Unis et l’Allemagne, les Canadiens étaient en territoire inconnu : une fiche de 0-3 et une pente abrupte à gravir pour faire partie du portrait éliminatoire. Le 27 e titre mondial semblait bien loin…
En plus de 60 ans de présence au championnat mondial, le Canada n’avait jamais commencé le tournoi sans victoire dans les trois premiers matchs. En fait, il n’avait jamais amorcé la compétition avec deux défaites. Mais en raison des restrictions liées à la COVID-19 et des périodes de quarantaine obligatoires, l’édition 2021 du tournoi était elle-même sans précédent.
Voilà peut-être pourquoi c’était si facile pour les représentants de l’unifolié de rester convaincus que cet obstacle pouvait être surmonté.
« Nous nous étions creusé un trou, mais même avant qu’Andrew Mangiapane arrive et nous aide à renverser la vapeur, nous avons toujours cru en nos moyens », explique Adam Henrique, le capitaine de la formation canadienne.
De l’extérieur, tout a semblé changer avec la venue de Mangiapane. L’avant des Flames de Calgary est arrivé en Lettonie après une décevante sortie en première ronde des éliminatoires et a dû se placer en isolement pendant deux semaines avant de rejoindre ses coéquipiers. Il a donc regardé les trois défaites du Canada de sa chambre d’hôtel. Lorsqu’il a enfin mis les pieds dans le vestiaire, l’équipe avait un genou par terre.
Mais elle était loin d’être K.O.
« Bien sûr, il a été un ajout de taille sur la glace, mais son arrivée a aussi eu un effet très bénéfique sur le moral de nos troupes à l’extérieur de la patinoire, explique Henrique. Il est agréable à côtoyer, drôle et toujours souriant. Sa personnalité énergique a déteint sur le reste des gars dans le vestiaire. »
« Et il a joué de manière incroyable. Ce n’est pas pour rien qu’il a été nommé Joueur par excellence du tournoi. Il a tout de suite su créer une chimie avec nous, et c’est beaucoup grâce à lui si nous avons pu remonter la pente. »
Henrique n’arrive pas à mettre le doigt sur un moment ou un match précis où le vent a tourné; l’équipe s’est plutôt soudée graduellement, notamment en passant beaucoup de temps à jouer aux cartes ensemble, puisque les sorties à l’extérieur de l’hôtel étaient restreintes en raison de la pandémie. Peu importe les raisons exactes, le Canada s’est remis à gagner.
Après des victoires contre la Norvège, le Kazakhstan et l’Italie, il avait maintenant une fiche de 3-3. La Finlande était le prochain pays sur son chemin, et les champions en titre avaient la ferme intention de lui barrer la route. Une victoire et les Canadiens obtenaient leur billet pour le quart de finale. Tout autre résultat, et leur destin n’était plus entre leurs mains.
« Nous avions rendez-vous avec la Finlande lors du dernier match de la ronde préliminaire et nous étions encore amers d’avoir échappé l’or en 2019. Ça nous a motivés, affirme Henrique. Nous avons réussi à tenir bon jusqu’en prolongation et à obtenir un point. Et même si nous avions encore besoin d’aide, je crois qu’à partir de ce moment, nous étions convaincus que nous pouvions nous rendre jusqu’au bout. »
Malgré une défaite de 3-2 défaite en tirs de barrage, il s’agissait d’un point précieux. Les Canadiens ont rapidement retraité au vestiaire pour voir le résultat de l’affrontement Allemagne-Lettonie. Si l’une des deux équipes l’emportait en temps réglementaire, l’unifolié passerait en quart de finale. Par contre, si le match se transportait en prolongation, l’Allemagne et la Lettonie poursuivraient leurs parcours, sonnant le glas du Canada.
L’Allemagne a marqué deux fois en première période. Les Lettons ont répliqué en deuxième, mais malgré plusieurs moments anxiogènes pour le Canada et ses partisans, le score a tenu. Direction : la ronde éliminatoire.
« Nous gardions évidemment un œil sur le classement et savions que nous avions peu de marge d’erreur. Il fallait gagner nos matchs et espérer que tous les morceaux tombent en place. C’est ce qui est arrivé, souligne l’attaquant canadien Nick Paul. Notre groupe s’est serré les coudes et a refusé de jeter la serviette. »
Dès lors, cette équipe semblait destinée à de grandes choses. En quart de finale, le Canada a vaincu la Russie 2-1 en prolongation grâce à un but de Mangiapane, qui a conclu une superbe pièce de jeu de Troy Stecher. Il l’a ensuite emporté 4-2 contre les États-Unis en demi-finale. Ne restait alors plus qu’à défaire ces coriaces Finlandais pour s’emparer de l’or.
Au terme d’une première période serrée, la Finlande avait pris l’avance grâce à un but de Mikael Ruohomaa, mais Max Comtois a nivelé le score en deuxième. Après que Petteri Lindbohm a redonné l’avance aux siens tôt dans le troisième vingt, Adam Henrique a forcé la tenue de la prolongation avec un but vers la 12e minute.
Il était minuit moins une pour l’équipe Cendrillon, alors que Nick Paul s’est présenté pour une mise au jeu en zone défensive.
« J’ai perdu la mise au jeu, se rappelle Paul. Mais j’ai anticipé que le centre finlandais allait passer à la ligne bleue. J’ai mis la lame de mon bâton sur la glace et intercepté la rondelle, ce qui a provoqué un deux contre un avec Connor Brown. Je sais que quand Brownie a la rondelle, il fait de bonnes choses avec.
Je lui ai donc rapidement refilé le disque, mais il est arrivé dans ses patins. Il a tout de même réussi à me faire une superbe passe. J’aurais pu marquer ce but les yeux fermés : la rondelle a atterri sur ma lame et j’avais un filet ouvert. »
Adam Henrique, pour sa part, garde un souvenir plus succinct du but en or.
« Dieu merci, rigole-t-il. Pauly qui fonce après une mise au jeu en zone défensive… on ne voit jamais ce genre de jeu! »
Mais ça a mené à un deux contre un. « C’est très difficile de décrire ce que nous ressentions sur le banc, comme un mélange de soulagement et d’incrédulité. Après tout ce qui nous était arrivé, nous avions remporté ce tournoi. Je n’oublierai jamais ce moment de ma carrière de hockeyeur. »
Ce n’était pas le début espéré pour la puissance du hockey qu’est le Canada, mais la fin a certainement dépassé les attentes. C’est un récit que l’on racontera souvent : celui de la plus grande remontée canadienne de l’histoire du Championnat mondial de l’IIHF.
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