2024 25 npt vincent boily summit

Vincent Boily, de sommet en sommet

Habitué aux défis, dont celui de s’être relevé d’une paralysie incomplète à la moelle épinière, le parahockeyeur québécois a repoussé ses limites en faisant l’ascension du mont Kilimandjaro

Eric Lavoie
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10 décembre 2024
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« Je me suis effondré et je me suis mis à pleurer comme un gros bébé. J’étais tellement émotif et brûlé mort. J’étais si fier de moi. »

C’était le matin du 28 juillet dernier.

Vincent Boily venait enfin d’atteindre le sommet du mont Kilimandjaro. Le toit de l’Afrique, en Tanzanie.

Un long périple jusqu’à 5 895 m d’altitude qu’il a complété en marchant plus de 90 km avec des orthèses tibiales, accompagné de dix adeptes de la randonnée et de plusieurs guides.

« J’ai fait des câlins avec les autres et j’ai partagé ma fierté avec eux », confie Vincent, qui était l’un des plus jeunes du groupe, à 24 ans.

Le jeune homme de Saint-Eustache avait besoin d’un autre défi dans sa vie, malgré qu’elle lui en avait donné plusieurs jusque-là. Et il voulait donner une visibilité à son sport, le parahockey, tout en amassant des sommes pour la Fondation moelle épinière et motricité Québec.

Vue sur les environs du mont Kilimandjaro.
Au fil de l’ascension, Vincent a pu admirer des paysages à couper le souffle. (Vincent Boily)

« Je voulais prouver aux gens que, même si j’étais handicapé, je pouvais faire quelque chose d’extraordinaire que même des personnes avec leurs capacités complètes auraient de la misère à réussir. »

Ce défi, il l’avait choisi. Contrairement à celui qui s’est présenté sur son chemin, bien malgré lui, le 26 décembre 2017.

Vincent était de passage dans sa région natale du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour le temps des fêtes.

Quelques jours plus tard, il devait aller rejoindre sa nouvelle équipe de la LHJMQ, l’Océanic de Rimouski, et son bon ami du hockey mineur, Alexis Lafrenière.

Il roulait à motoneige avec son parrain. Sur des pistes glacées, il a pris une courbe trop vite et a été violemment éjecté du véhicule. Vincent a subi de nombreuses fractures.

Mais surtout, une paralysie incomplète de la moelle épinière a changé à jamais la trajectoire de sa vie.

Il a passé plusieurs mois à l’hôpital et a dû réapprendre à marcher.

« C’est inhumain ce que j’ai enduré à l’hôpital. J’avais mal aux heures. Je suis passé de 160 à 120 livres en raison des chirurgies et de ma longue hospitalisation. »

Joueur de hockey rapide et habile au petit gabarit, Vincent avait toujours dû redoubler d’ardeur pour atteindre les plus hauts niveaux du hockey mineur avec les Vikings de Saint-Eustache de la LHM18AAAQ.

Mais, cette fois, plus que jamais, il avait besoin d’aide pour traverser la plus grande épreuve de sa vie.

Une aide qui lui a permis de développer une force de caractère insoupçonnée.

« Mes parents ont été des superhéros, encore plus que moi. Ma mère m’a accompagné chaque jour et mon père chaque soir pendant tout mon séjour à l’hôpital. Ensuite, ma mère a pris un an de congé pour s’occuper de moi à la maison. Sans mes parents, je n’aurais pas pu sortir de mon accident aussi fort. »

Vincent Boily, assis dans son fauteuil roulant, joue au tennis de table avec son père, Érick Boily.
Au cours de sa longue réadaptation, Vincent a profité du soutien indéfectible de ses parents, Ann Mathieu et Érick Boily. (Vincent Boily)

Son retour à la maison, après environ cinq mois à l’hôpital et au centre de réadaptation, a probablement été encore plus difficile pour lui. Une fois la poussière retombée, il a vécu une sévère dépression.

« Ça a vraiment crashé pour moi. Mes amis retournaient à leurs camps de hockey. Je n’étais pas encore autonome. J’ai remis mes patins et j’ai réalisé que mon rêve d’aller plus loin au hockey était terminé. Tout ce que j’avais fait en physio, c’était dans l’esprit de pouvoir rejouer. »

En janvier 2019, un peu plus d’un an après son accident, Vincent a décidé de reprendre sa vie en main.

« Je suis parti seul en Australie pendant trois mois. J’avais besoin de faire quelque chose par moi-même pour retrouver mes repères. J’ai profité de la vie en faisant du surf et ça m’a vraiment fait du bien. Mais à mon retour, il me manquait quelque chose. J’avais toujours été un athlète et je carburais encore à ça. »

La découverte d’un nouveau sport

À la recherche des sensations qui le faisaient vibrer lorsqu’il jouait au hockey, Vincent a essayé l’aviron et le paracyclisme.

« Patrick Desnoyers [le capitaine d’Équipe Québec au parahockey], avec qui je faisais de la physio, n’arrêtait pas de m’inciter à essayer le parahockey. Moi j’avais fait mon deuil du hockey depuis mon accident et je ne voulais pas pratiquer ce sport différemment.

« Finalement, je me suis laissé tenter et j’ai aimé ça. À ma première saison en 2021-2022, j’ai été choisi par Équipe Québec. »

Déjà très habile au hockey debout, Vincent s’est rapidement adapté à son nouveau sport. Si bien qu’il a été sélectionné par l’équipe nationale de parahockey du Canada pour la saison 2022-2023.

Cette découverte a véritablement donné un nouveau souffle à sa vie.

Au Championnat mondial de parahockey 2024 en mai dernier à Calgary, Vincent a participé à la magnifique conquête de la médaille d’or du Canada. Depuis 2017, le titre mondial avait échappé à l’équipe nationale, mais une victoire serrée de 2-1 en finale contre les puissants Américains a permis à Vincent et à ses coéquipiers de prendre place au sommet de leur sport.

Vincent Boily fait l’accolade à Anton Jacobs-Webb sur la glace
Pétillant de fierté, Vincent fait l’accolade à son coéquipier Anton Jacobs-Webb après la conquête de l’or. (Erica Perreaux/Hockey Canada Images)

« Je rêvais de représenter mon pays quand je jouais au hockey dans ma cave plus jeune. Je n’avais jamais vécu une victoire contre les États-Unis depuis mes débuts, et de réussir ça avec mes frères qui sont devenus tellement importants dans ma vie, c’était vraiment émouvant. »

Le défi de la Tanzanie

À peine deux mois après avoir vécu l’euphorie du Mondial, Vincent s’est envolé vers la Tanzanie pour y rejoindre un groupe d’inconnus avec qui il allait faire équipe dans son ascension du mont Kilimandjaro.

Il était le seul Canadien. Et le seul avec un handicap.

« Après la première journée, j’étais complètement brûlé, dit-il en riant. J’avais un peu sous-estimé l’ampleur de la tâche, mais je savais que j’étais capable. »

Comme avec ses coéquipiers sur la glace, Vincent a tissé des liens étroits avec ses partenaires de marche et les nombreux guides de l’aventure.

« On est devenus hyper proches, on s’est appuyés les uns les autres au fil des jours. »

Chaque journée de marche d’un camp à l’autre se faisait à un rythme lent, mais le poids des kilomètres jumelé à l’acclimatation à l’altitude rendait la tâche de plus en plus ardue. Malgré ses limitations physiques, Vincent n’a jamais senti qu’il ralentissait le groupe.

Au-delà du défi physique qu’il affrontait, Vincent avait un atout dont il comptait bien se servir jusqu’à la toute fin pour survivre à la dernière montée jusqu’au sommet, qui l’a forcé à puiser dans ses dernières réserves.

« Mon niveau mental était tellement solide, étant donné ce que j’avais vécu après mon accident. Ce qui me motivait le plus, c’est que les médecins m’avaient dit que je ne pourrais plus marcher. Je me disais : check-moi aujourd’hui, check-moi aujourd’hui! »

Au début de la nuit, après la sixième journée de marche, Vincent et son groupe ont amorcé l’ultime étape : une montée d’environ neuf heures jusqu’au plus haut sommet de l’Afrique. Deux personnes de son groupe avaient déjà été contraintes à l’abandon en raison de l’altitude (et deux autres allaient devoir s’arrêter aussi par la suite).

Un groupe de marcheurs monte le mont Kilimandjaro dans un décor splendide.
Vincent et ses partenaires ont amorcé la dernière portion vers le sommet à minuit en haute altitude. (Vincent Boily)

« Je ressentais l’altitude à un niveau vraiment extrême. J’étais comme un robot, je ne contrôlais pas mon corps ni mon esprit. Personne ne parlait, tout le monde survivait. »

« Quand je suis arrivé près du sommet, je voyais la pancarte du haut de la montagne à environ 200 m, mais je n’arrivais pas à m’y rendre. J’arrêtais aux 30 m. J’ai puisé dans une réserve que je ne savais même pas que j’avais et je me suis rendu. »

C’est à ce moment qu’il a fondu en larmes, si fier d’avoir encore une fois repoussé ses limites.

Et quel sera son prochain défi maintenant, outre sa participation à la Coupe de parahockey 2024 à Charlottetown en décembre?

« Je souhaite représenter mon pays aux prochains Jeux paralympiques. Je veux devenir la meilleure version de moi-même au parahockey et un ambassadeur pour mon sport. »

Pour plus d'informations :

Esther Madziya
Responsable, communications
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(403) 284-6484 

[email protected]

 

Spencer Sharkey
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